Boris Cyrulnik a souhaité créer un lieu de réflexion pluridisciplinaire où pourront s’échanger, des idées, des pratiques et des recherches hors des circuits classiques de l’université ou des instituts de recherches.
Lors d’une réunion organisée le 16 février, il a exprimé son désir de favoriser le développement, la recherche et la diffusion du savoir dans les domaines de l’attachement, du trauma et bien sur de la résilience.
« Crée en 2015, le Fonds de dotation Boris Cyrulnik a, à cœur trois thématiques : l’attachement, le trauma et la résilience.
L’enjeu principal est de favoriser le développement, la recherche et la diffusion du savoir dans ces trois domaines.
Le savoir doit être partagé, mais il doit aussi être nourri : le Fonds Boris Cyrulnik souhaite permettre aux chercheurs comme aux praticiens de transmettre le résultat de leurs travaux, de les développer, mais également d’en favoriser l’accessibilité et la mise en pratique.
La connaissance de l’individu, du tout jeune enfant à la personne âgée, est précieuse : elle seule permet de répondre aux grandes problématiques sociales et sanitaires de notre monde. Offrir une meilleure prise en considération des facteurs de risque et des troubles engendrés tant au niveau de l’individu qu’à celui de la société est en ce sens essentiel.
Dans sa double finalité théorique et pratique, le fond de dotation Boris Cyrulnik met en oeuvre un certain nombre d’activités telle que l’organisation de séminaires, de colloques ou des rencontres ponctuelles entre chercheurs, universitaires, praticiens et étudiants, la création de réseaux et de groupes de travail internationaux, la mise en place de journées de formation, la publication d’ouvrages ou d’articles, la subvention de travaux de recherches universitaires, le soutien à des initiatives promouvant le développement…
Présentation des séminaires de recherche de l’année 2015-2016
Outre d’autres activités, le Fonds Boris Cyrulnik tient particulièrement à organiser quatre rencontres annuelles autour de thématiques liées à l’attachement, au trauma et à la résilience. En ouvrant de nouvelles perspectives grâce à la rencontre de spécialistes internationaux issus de toutes disciplines, ces séminaires de recherche visent à offrir des dynamiques toujours renouvelées de recherche et de réflexion.
L’homme est l’animal
L’homme est d’abord un animal, nous avons tendance à occulter ce fait. A force de vouloir mettre en avant la spécificité de l’Homme, nous creusons sa différence avec les animaux. Mais qu’en est-il vraiment : notre évolution est-elle si distincte ? Et quid de nos émotions, du langage, de notre sentiment vis-à-vis de la mort ? La comparaison entre l’Homme et l’Animal est bien riche, d’une richesse qui nous invite à penser que, peut-être, l’homme est animal…
L’enjeu de cette séance est de décloisonner, notamment grâce à la rencontre de l’éthologie, de la médecine et de la psychologie, homme et animal : une telle confrontation est en effet riche d’enseignement quant au développement mais aussi aux réactions et possibilités de l’homme.
Le langage totalitaire
Un nourrisson est amoral. Il ne peut que réagir aux stimulations encore mal différenciées internes et externes.
Quand un enfant accède à la parole, il devient capable de se représenter le monde mental d’un autre. Un frein émotionnel s’installe en lui : il ne peut plus tout se permettre. Le fondement d’une démarche éthique dépend de son développement dans son milieu affectif et culturel. L’altération de ce processus peut venir de la biologie (encéphalopathie), de l’affectivité (abandon, violence éducative) ou de la culture (une seule représentation, une seule vérité, un seul chef). Les récits donnent forme à ces altérations ; quand la culture impose un seul récit et empêche la découverte d’autres croyances religieuses, laïques ou scientifiques, ce langage unique et totalement explicatif rejette ou interdit toute autre conception du monde. L’ordre règne, les individus perdent l’accès au jugement. Ils n’ont que le choix entre la soumission et la rébellion.
Ce séminaire a pour vocation de comprendre les tenants et aboutissants d’un tel langage totalitaire : comment saisir que certains individus deviennent prisonniers d’un tel système, comment comprendre qu’il leur apparaisse légitime de tuer ou de devenir l’auteur de violences ? Développement, croyances, jugement et comportement de l’individu dont les liens et l’environnement sont altérés sont à même de rendre raison de l’insensé, où le drame d’une vie peut conduire au drame de maintes vies.
Trauma et résilience : « l’avant »
Il y a le moment du trauma, mais aussi l' »avant » et l' »après ». Car tout aussi importante que la structure du trauma est la compréhension, la prise en considération des périodes le précédant comme lui succédant.
Première d’une série de trois séances, ce séminaire s’attachera à comprendre l’importance et les enjeux de fondation de l’individu : environnement, relations d’attachement, interactions précoces, développement cérébral… Selon son lieu de vie, sa culture, sa société, sa famille, ses valeurs, tout un chacun est porteur d’un développement spécifique. Ce dernier peut se révéler aussi bien riche et aidant lorsque l’individu est confronté à un drame que, au contraire, délétère. Penser le trauma est aussi penser notre responsabilité en amont de celui-ci. Une responsabilité médicale, sociale, politique, mais une responsabilité d’abord partagée. Mais pour répondre, il nous faut d’abord savoir, comprends et saisir l’importance cruciale de l' »avant ».
Le temps qui passe
» Ô temps ! suspends ton vol… » Mais le temps jamais ne s’arrête… et peut-être pour le mieux ! Avec le temps, les souvenirs et la mémoire forgent notre identité, notre cerveau et nos relations interpersonnelles se développent… Mais le temps, c’est aussi ce qui impulse notre existence, lui donne matière et sens ou qui, au contraire, peut sembler se figer dans le trauma ou le drame. Reste néanmoins que le temps demeure une notion plurale, offrant autant de définitions pour le neuroscientifique, l’astrophysicien, le psychologue, l’historien, le philosophe, ou encore le nostalgique…
Ce séminaire s’intéressera ainsi à la dimension temporelle de nos existences : le temps modèle l’individu comme il est lui-même voué à être modelé par ce dernier. Le temps passé, constructeur ou destructeur, demeura toujours une voie essentielle pour notre présent comme pour notre futur.