Le petit livre est un outil Freinet mis à l’honneur par l’école Garcia Lorca de Vaulx en Velin qui a reçu le prix de l’éducation pour son projet d’éditions Célestines (du nom de Célestin Freinet). Peu couteux, facile à utiliser : une page de format A4 qu’on plie en huit pour former un livre ; il facilite la communication entre les enfants et leur famille, renforce l’estime de soi et la création des enfants. C’était l’outil idéal pour évoquer les droits de l’enfant. Les aventures de Fred le remplaçant ont permis auparavant de traiter de nombreuses questions telles que les ateliers philosophiques.
Sur le site des éditions Célestines http://petitslivres.free.fr, on peut lire des histoires écrites par les enfants mais aussi des textes tels que : les jeux dangereux, la protection de l’enfance…
Extraits :
Fred notre remplaçant est fatigué, les trois semaines passées dans ce CE2 d’une école de centre ville n’ont pas été enthousiasmantes, des élèves scolaires, des collègues vieux avant l’âge, pas de vrai projet… C’est pourquoi il accueille avec plaisir l’idée d’un remplacement dans un CM2 de ZEP, une école qui n’a pas très bonne réputation, mais il se méfie des réputations et « Au moins, je servirai à quelque chose !» Et puis il fait encore beau en ce début de mois d’octobre et le soleil brille quand il rejoint, ce vendredi matin, sa nouvelle école.
La directrice et ses nouveaux collègues l’attendent avec café et croissants, « te trompe pas, ce n’est pas comme ça tous les jours, mais on a des choses à te dire! »
L’enthousiasme fait vite place à l’inquiétude, la classe est annoncée comme particulièrement difficile, la collègue qu’il va remplacer a craqué, c’est une « cuvée » problématique, depuis le CP, malgré des départs et des arrivées, le groupe a donné du fil à retordre et l’année dernière, manque de chance, congé maternité, plusieurs remplaçants, la situation s’est aggravée. Et même si la directrice et les collègues promettent leur aide, Fred sent que ça ne va pas être le plaisir auquel il s’attendait.
Il sait que la première impression est importante, il hésite, mais il ne va pas, comme il le fait souvent quand il aborde une nouvelle classe, commencer par lire un texte fort, il ne veut pas brûler tout de suite ses meilleures cartouches.
Il décide faire connaissance en suivant le programme prévu pour la matinée, récitation, dictée préparée, lecture et calcul mental. Les élèves savent qu’ils sont allés trop loin avec la titulaire, la directrice a été claire dans la lettre adressée à leurs parents et ils sentent que le nouveau maître n’est pas prêt à tout accepter, cependant ils manifestent leur désintérêt ; le travail n’a pas été préparé, la poésie n’est pas sue et ici ou là il entend que ça sert à rien, que l’école c’est nul… Il ne peut s’empêcher de leur dire, juste avant qu’ils ne quittent la classe, qu’aller à l’école c’est une chance et que des enfants dans certains pays se battent pour pouvoir y aller !
C’est la franche rigolade pour certains élèves!
Fred qui a beaucoup voyagé, s’est toujours intéressé à la condition des enfants dans le monde, il possède beaucoup de photos et de films, documentation qu’il a complétée grâce à l’Unesco notamment sur le travail des enfants.
Cet après-midi, c’est géographie et bien ce sera géographie humaine avec des extraits de films montrant des enfants de six ans, parfois moins, dans les mines, tissant des tapis, d’autres faisant la mendicité, crasseux et à peine vêtus, d’autres encore dormant sous des cartons. Et puis il termine par des photos prises dans des villages africains où le maître fait la classe pour une centaine d’enfants silencieux et attentifs.
Les remarques et les questions fusent, c’est quand ? C’est pas aujourd’hui ? Qu’est-ce que ça veut dire ? …
Alors le maître commence à raconter, les conditions de vie dans certains pays d’Afrique et d’Asie, la pauvreté, la misère, l’impossibilité d’envoyer les enfants à l’école, l’école interdite aux filles, même si l’éducation est un droit. Il sent qu’il les a touchés, ils ont même oublié la récréation. Fred sort, épuisé, de cet après-midi, mais il sent qu’il a peut-être un moyen de faire entrer ses élèves dans le plaisir de savoir et puis il a parcouru le règlement de la classe, une liste d’interdits et d’obligations et une idée commence à germer.
De retour chez lui, il se précipite sur sa documentation pédagogique, c’est bien ça, il ne s’est pas trompé. Dans un numéro du magazine de l’OCCE on parle des 20 ans de la CIDE, la Convention Internationale des droits de l’enfant, le 20 novembre.
Il lui reste quelques semaines. Il peut organiser une partie du programme de la classe autour des droits de l’enfant, lecture, écriture, poésie, géographie, histoire, littérature. Heureusement, il a tout son week-end.
Associer le reste de l’école serait une bonne idée ! Il appelle la directrice pour une demande de réunion avant la classe le lundi matin, cette fois, c’est moi qui ait quelque chose à vous dire, et à mon tour d’apporter les croissants. Il sent son inquiétude, et la rassure aussitôt, c’est un projet, j’aurai besoin de votre aide, on pourrait préparer ensemble, les 20 ans de la Convention Internationale des Droits de l’enfant !