Quelques jours après les évacuations du camp la « Jungle » de Calais, fin octobre, et de celui Stalingrad le 4 novembre, le comportement de l’État envers les mineurs isolés avant et pendant les « démantèlements » sont dénoncés par les acteurs associatifs et les institutions internationales.

Au cours de l’été 2016, on dénombrait plus d’un millier de mineurs isolés rien que dans le camp de la « Jungle » de Calais, survivant par eux-mêmes ou grâce aux associations humanitaires présentes sur le terrain, dans des conditions extrêmes. Ils sont près de 1800 à avoir été pris en charge par l’État, lors de la destruction du bidonville.

Cette situation a duré, au total, plus d’un an et demi et il n’est pas à exclure que ces enfants ou d’autres réapparaissent dans des camps, sur le littoral du Pas-de-Calais, comme ailleurs en France.

Le risque d’assister à un retour des enfants dans les camps

La recommandation du Défenseur des droits du 21 juillet 2016 [1] dénonçait cette situation et sommait l’État d’assumer sa responsabilité dans la protection des mineurs isolés présents sur son territoire ; puis celle du 14 octobre [2] demandait aux autorités le respect de « principes devant présider à l’évacuation de terrains occupés » [sic] dans le respect du droit à la protection de l’enfance, le maintien aux autres droits fondamentaux, à la scolarisation et le suivi médical des enfants. Le Défenseur des droits exprimait, pour finir, sa préoccupation face aux risques d’assister à un retour de mineurs dans des bidonvilles plus précaires encore. Enfance Majuscule avait également formulé sa vive inquiétude à ce sujet au début du mois d’octobre [3].

Un démantèlement au mépris du droit des mineurs 

Le gouvernement avait promis un « démantèlement humanitaire » du camp. Face à l’afflux de migrants se déclarant en dessous de 18 ans, les agents l’État avaient procédé à des évaluations de l’âge « de visu », pratique hors de tout cadre légal se basant sur les traits physiques. (Le juge des enfants est le seul compétent en France pour pouvoir déterminer la minorité d’un individu se prétendant tel).

Ce sont au total 1600 mineurs qui ont été ensuite placés dans le Centre d’Accueil Temporaire (CAP), la partie du camp gérée par l’État. A cause d’un manque de place dans celui-ci, plusieurs centaines d’enfants ont été forcés de vivre et de dormir dehors, en face du CAP, pendant plus d’une semaine, du 24 octobre au 2 novembre, puisque leurs abris avaient été détruits.

La "Jungle" de Calais et le centre d'accueil provisoire où ont été hébergés les mineurs isolés lors du démantèlement
La « Jungle » de Calais et le centre d’accueil provisoire où ont été hébergés les mineurs isolés lors du démantèlement

Deux adolescents ont été ciblés par des tirs d’armes à feu durant le démantèlement à proximité de la « Jungle » de Calais. [4]

Lire également : Démantèlement de la « Jungle » de Calais, le sort des mineurs isolés.

Quelle prise en charge pour les mineurs isolés de Calais ?

La circulaire sur les CAOMI du 1er novembre 2016 prévoit le placement des enfants déplacés de Calais dans des « centres d’accueil et d’orientation des mineurs non accompagnés » (CAOMI) [5], type de structure nouvellement créé, pour une période temporaire estimée à 3 mois, avant qu’ils soient redirigés vers les dispositions classiques de la protection de l’enfance ou vers le Royaume-Uni dans les cas des enfants éligibles à un regroupement familial vers ce pays. Les mineurs ont finalement quitté Calais pour rejoindre en bus ces CAOMI le mercredi 2 novembre.

La France et le Royaume-Uni épinglés par les Nations Unies

Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme s’est saisi de la question et a condamné le traitement dont les mineurs ont été victimes à Calais et l’inaction dont ont fait preuve la France et le Royaume-Uni.

« Les désaccords entre les gouvernements français et britannique sur la question de savoir lequel de ces pays avait le devoir d’assumer la responsabilité de la majorité de ces enfants ont mené à des violations des droits de ces enfants. Des centaines ont été soumis à des conditions de vie inhumaines, laissés sans abri adéquat, sans nourriture, sans accès à des services médicaux et à un soutien psychosocial, et se sont retrouvés, dans certains cas, exposés à des passeurs et des trafiquants. » [6]