Quand les soldats sont des enfants, quel avenir peut-on espérer pour eux ?

« Il n’y a pas de guerre propre ou de guerre sale » disait Stanislaw Tomkiewicz. Mais, si pour les enfants toutes les guerres sont  dévastatrices, elles sont totalement destructrices pour les enfants soldats.

Lorsque l’on demande à des enfants d’endosser des uniformes et de s’entraîner au maniement d’armes parfois plus grandes et plus lourdes qu’eux, lorsqu’ils servent au déminage et sont mutilés par des mines anti personnelles, lorsqu’ils sont enrôlés de force dans les troupes combattantes quelles que soient les conventions qui l’interdisent explicitement, quand ils servent de défouloir sexuel aux adultes car la guerre démantèle et détruit l’organisation civile et morale de chacun, alors, ces enfants perdent absolument tous leurs repères.

Des victimes transformées en soldats

Nous faisons preuve d’empathie envers les millions d’enfants morts, les enfants réfugiés, les enfants orphelins qui ont vu leurs parents tués ou violés sous leurs propres yeux, mais nous n’avons pas encore pris la mesure de la dévastation psychique vécue par les enfants soldats. Si l’on veut sauver un enfant victime de guerre, un enfant soldat, nous devons, non seulement le nourrir mais aussi lui parler, l’écouter, l’entendre car les enfants sont dans un état de terreur absolue et certains ont perdu même jusqu’à la parole.

Des images de haine, de rancune, de violence et de massacres ont été instillées dans leur esprit installant pour longtemps une imagination meurtrière et des séquelles névrotiques graves. Ils ont eu le pouvoir en prouvant jour après jour qu’ils étaient capables d’actes de cruauté et de barbarie.

Des tabous transgressés

Boia Efraim, psychologue formé en psycho traumatologie, lors d’une étude menée auprès des enfants soldats du Mozambique, repère un certain nombre de mécanismes qui permettent à leurs bourreaux de transformer de jeunes victimes en soldats sanguinaires :

– L’obéissance aux ordres sous peine d’être exécuté
– La dévalorisation des victimes qui sont « d’une race inférieure » et qu’il faut anéantir
– L’identification à l’agresseur qu’ils surpassent même parfois dans les actions violentes
– La jouissance d’un pouvoir inhabituel pour leur âge

Des enfants vétérans de guerre

Lorsque l’on force des enfants à transgresser tous les tabous sociaux sous peine d’être exécutés, les dommages psychiques sont incommensurables. Les traces de ces souffrances indicibles s’inscriront pour toujours dans l’inconscient de ces enfants. Certains arriveront peut-être à se reconstruire, et cela ne sera possible que si une « armée », empathique, formée à la désintoxication sectaire et à la thérapie post traumatique de guerre, convaincue qu’il ne faut jamais désespérer d’un enfant, accepte de se battre à leurs côtés, parfois pendant des années, pour en sauver un. D’autres perdront, soit réellement la vie, soit passeront à côté de la leur. Ce qui est sûr, c’est qu’ils resteront tous brisés à vie.