Le 5 juin 2015, Daniel Legrand fils a été acquitté par la Cour d’assises des mineurs de Rennes après 3 semaines de débats. C’était le dernier acte de ce qu’on a appelé l’affaire d’Outreau.
Les décisions d’acquittement des cours d’assises ne sont pas motivées, les débats sont secrets, et nous ne connaîtrons jamais les pensées profondes des jurés. En tout état de cause, l’affaire est définitivement close : Daniel Legrand n’a pas été tenu pour coupable des faits qui lui étaient reprochés.
Ces trois semaines de débats à Rennes laissent pourtant un goût amer, parce que rien ni personne n’y était à sa place. On a vu se dérouler, non le procès d’un homme, mais celui du procès de Saint Omer et encore une fois celui du juge Burgaud et de l’instruction.
Le procès du procès
La stratégie de la défense fut exactement la même que lors de l’appel à Paris : Daniel Legrand, mis en examen, était LA victime, victime d’un système judiciaire absurde, de l’acharnement de révisionnistes acharnés, et de parties civiles inconscientes. Ses avocats proclamaient haut et fort que le procès n’aurait jamais du avoir lieu, arguant d’un « accord » avec le parquet pour que l’affaire ne soit jamais audiencée, une presse tout acquise se faisant la caisse de résonance de leurs protestations.
Les « acquittés », effondrés, sont venus raconter leur long martyr, et proclamer d’un même élan qu’ils ne connaissaient pas Daniel Legrand mais qu’ils le savaient innocent.
Et les condamnés, Myriam Badaoui en tête, autrefois qualifiée de mythomane, aujourd’hui parangon de la vérité, ont pu affirmer qu’ils ne l’avaient jamais vu…
Les aveux circonstanciés de Daniel Legrand lors de l’instruction ? Extorqués, n’en parlons plus.
Le rôle du Parquet
Le parquet défend en principe la société. Or, on l’a bien peu entendu parler du drame de la pédophilie et des victimes, des enfants abusés ou de la manière dont notre société les a traités. Il avait convoqué des experts : on a cru rêver en entendant un belge affirmer que, selon « une étude récente » les enfants de 5 ans mentent 5,9 fois par semaine… et un canadien à qui l’avocat général avait expliqué ce qu’il attendait de lui. Ceux qui ont osé parler de mémoire traumatique ont été traités de « pseudo-sachants ».
Certes, personne n’a plus osé affirmer que les enfants Delay mentent. Mais s’ils ne mentent pas, c’est qu’ils sont victimes… de faux souvenirs.
L’avocat général fut si bon avocat pour Daniel Legrand, en mettant en garde les jurés contre l’erreur judiciaire, que ses 6 avocats ont renoncé à plaider : toujours la même stratégie qu’à Paris : ils ont évidemment raison et rien à expliquer.
La vérité judiciaire
La vérité judiciaire est dite. Elle ne correspond pas à celle des enfants victimes, mais rien ni personne ne peut la contester.
L’affaire Outreau est définitivement terminée.
Ce qui restera pourtant, ce qui justifie la tenue de ce procès, c’est la grande dignité de Cherif, Jonathan et Dimitri, survivants d’une enfance fracassée. Pour la première fois, ils ont pu parler librement, dire leur vie et la façon dont ils ont été traités par notre société tout entière.
Souhaitons qu’ils puissent désormais penser l’avenir de manière un peu apaisée.