Comment justifier une telle mutilation perpétrée sur un enfant avec l’accord de ses propres parents ? L’explication par le caractère coutumier de cette pratique est généralement associée à des motivations religieuses. Pourquoi ces pratiques perdurent-elles, et dans quelles conditions et quelles en sont les conséquences ?

L’excision et les fondements religieux…

Ces pratiques datent de l’âge de pierre, c’est-à-dire avant toute civilisation. Elles ne sont pas le fait d’une culture ou d’une religion – chrétiens, musulmans, juifs, animistes la pratiquent – même si, en fait, les ethnies qui pratiquent l’excision et l’infibulation sont aujourd’hui principalement de religion musulmane. Mais, le Coran ne commande jamais l’excision et Mahomet, le prophète, n’a pas fait mutiler ses propres filles. Les anciens Bambaras, Malinkés, Dogons, pensaient que l’enfant, à sa naissance, est à la fois mâle et femelle. Pour « s’installer » dans son sexe, le garçon doit perdre son prépuce, siège de sa féminité, et la fillette son clitoris, siège de sa masculinité.

De véritables mutilations…

L’excision, c’est l’ablation plus ou moins étendue du clitoris et des petites lèvres du sexe féminin (l’excision a minima, qui consiste en l’ablation du capuchon du clitoris est peu répandue). Cette mutilation est pratiquée par de nombreuses ethnies originaires d’Afrique de l’Ouest principalement, mais également en Indonésie et chez certaines tribus d’Amazonie. En Afrique de l’Est (Djibouti, Éthiopie, Somalie, Soudan, Égypte. Kenya) c’est une forme encore plus grave de l’excision qui est pratiquée : l’infibulation, également appelée excision pharaonique. Elle consiste à sectionner les grandes lèvres, après avoir coupé le clitoris et les petites lèvres. Les moignons sont ensuite rapprochés bord à bord, suturés en général avec des épines d’acacia, de manière à ne laisser qu’une minuscule ouverture nécessaire à l’écoulement de l’urine et du sang menstruel. L’orifice est maintenu ouvert par un petit éclat de bois, souvent une allumette. Les jambes de la fillette restent attachées durant plusieurs semaines, jusqu’à ce que la blessure soit cicatrisée. La vulve a alors disparu, remplacée par une cicatrice très dure. La femme sera « ouverte » au moment du mariage, par le mari ou une matrone, puis plus largement par une sage-femme traditionnelle lors de la naissance d’un enfant. Il n’est pas rare qu’une femme soit désinfibulée puis à nouveau infibulée lors de chaque accouchement.

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…aux conséquences dramatiques

L’excision est une « affaire de femmes » et les hommes n’y assistent jamais. Ce sont généralement des matrones de la caste des forgeronnes, traditionnellement habilitées, qui opèrent soit chez elles, soit chez les parents et se font rémunérer par des cadeaux de toutes sortes. En France, elles sont très présentes dans les foyers de travailleurs immigrés. La petite fille est placée sur les genoux de sa mère, qui maintient ses jambes écartées. L’exciseuse tranche à vif le sexe de l’enfant soit avec une lame de rasoir, soit un couteau à lame souple ou même une paire de ciseaux.

Sur le moment, la peur et l’angoisse accompagnent une douleur atroce, pouvant entraîner un choc cardiaque. Une hémorragie massive ou des saignements continus peuvent causer la mort. Les hématomes, les brûlures lors de l’émission des urines et la peur provoquent des rétentions urinaires. Les conséquences ultérieures de cette mutilation sont tragiques : les infections locales fréquentes – vulvaires, urinaires, gynécologiques – peuvent se généraliser (abcès, adénite gangrène, tétanos, septicémie) et on constate des névromes (tumeur) du nerf dorsal du clitoris.

Les risques en matière de santé

Les infections peuvent entraîner la stérilité. Les accouchements sont difficiles et compliqués. Même assistée médicalement, une femme excisée risque plus qu’une autre une déchirure du périnée. Une étude faite à Mantes-la-Jolie en 1983 montre que les femmes excisées subissent plus d’épisiotomies et de déchirures périnéales, surtout lorsqu’elles sont primipares. La blessure ou l’élimination du clitoris – l’organe du plaisir de la femme – entraîne une diminution ou une disparition de la sensibilité et donc, une insatisfaction sexuelle. Les répercussions sur la santé mentale sont graves : anxiété, angoisse, dépression. Les complications de l’infibulation sont encore plus graves et plus fréquentes que celles de l’excision : dans l’immédiat, infection, hémorragie, blessure des organes voisins, choc, rétentions aiguës, décès ; à long terme, infections urinaires et génitales chroniques, troubles de la menstruation, déchirures périnéales, anémie et retards de croissance dû à cette anémie.