En 1976, une petite fille de 5 ans est confiée à l’ASE par décision du juge des enfants. L’enfant est alors placée dans une famille d’accueil où elle restera jusqu’à sa majorité, victime de viols et abus sexuels de la part du père de famille, élevée comme un Témoin de Jéhovah, alors qu’elle était de famille musulmane.
Quelques années après sa majorité, la jeune femme avait saisi les juridictions administratives et pénales pour obtenir la condamnation du père d’accueil et la réparation des carences de l’ASE. Aucune de ces démarches n’ayant abouti, elle a saisi la CEDH, qui vient de condamner la France pour violation des articles 3 et 9 de la Convention internationale des droits de l’Enfant (CIDE).
La Cour Européenne des Droits de l’Homme, dans une décision du 3 novembre 2022, vient de condamner la France pour ne pas s’être donné les moyens de protéger l’enfant, de prévenir et détecter les violences dont elle était victime, et à lui verser une somme de 55 000 € pour préjudice moral.
La Cour a relevé que l’ASE avait ignoré toutes les alertes : pas de visites en 5 ans, pas de contact avec les établissements scolaires, alors que les rapports signalaient la nervosité de l’enfant et ses difficultés scolaires. L’ASE ignorait même que la famille d’accueil était membre des Témoins de Jéhovah, jusqu’à ce que les médecins alertent le Procureur de la République pour autoriser une transfusion de sang.
Elle relève également que c’est un formalisme excessif qui avait conduit les juridictions administratives saisies à rejeter tout recours en indemnisation.
Cette décision est un rappel essentiel à la France : l’existence de lois protectrices ne suffit pas ; l’État se doit de contrôler leur efficacité et la réalité de leur application.