Dispositif de Lutte contre la prostitution des Mineurs : le 119 présente le bilan d’une riche année de travail

Dans le cadre du premier plan interministériel de lutte contre la prostitution des mineurs de novembre 2021, le 119, service national d’accueil téléphonique de l’enfance en danger, lançait en avril 2023 un nouveau dispositif : une plateforme nationale téléphonique spécifique. En tant que partenaire, Enfance Majuscule était présente lundi 22 avril à l’Espace CEDIAS, lors de la restitution des premiers résultats de ce dispositif décliné en 3 axes, ayant pour principales missions : repérer, alerter, conseiller et orienter.

Axe 1 : Une plateforme nationale d’écoute, de conseil et d’orientation

Les chiffres de cette première année de lancement sont lourds de sens : ce nouveau dispositif, Dispositif de Lutte contre la Prostitution des Mineurs (DLPM), s’est vu sollicité dans le cadre de 143 situations différentes, incluant 12 nouvelles situations chaque mois, pour 439 prises de contact. Les mineurs évoqués sont, sans surprise, 94% des filles, âgées en moyenne de 15 ans et issues de 59 départements différents. Un rajeunissement est également déploré, beaucoup de jeunes victimes étant âgées de tout juste 13/14 ans.

Les problématiques identifiées, associées à la prostitution des mineurs, sont principalement :
– des manifestations de souffrances psychologiques (86%)
– des situations de fugues (84%)
– un désinvestissement de la scolarité (70%)
– une consommation de produits stupéfiants et/ou d’alcool (51%)

Les divers profils des appelants, quant à eux, sont les suivants :
– des personnes issues du premier cercle familial, notamment les mères (43%)
– des professionnels (20%)
– la famille élargie ou des personnes de l’entourage de la famille (14%)
– des personnes ne souhaitant pas se désigner (12%)
– des alertes de témoins (7%)
– des mineurs (4%)

Sous l’emprise de leurs proxénètes, les mineurs victimes dénoncent principalement les clients. Comme souligné lors de la restitution de ce bilan, les mineurs touchés par ces problématiques sont souvent peu disponibles et les assistantes socio-éducatives, malgré un énorme travail de mise en œuvre d’une organisation interne qui a permis de mettre en place un système de rappels successifs autour d’une même situation, peinent parfois à accompagner ces jeunes en souffrance sur la durée.

D’autres chiffres inquiètent également : dans 62% des cas, les mineurs sont déjà connus des services de protection de l’enfance. Un système de protection des mineurs loin d’être à la hauteur et qui interpelle : qu’en est-il des 38% restant ? Pourquoi n’ont-ils, celles et ceux là, pas été vus ni entendus ?

Parmi les actions engagées par le DLPM :
– 87% d’informations préoccupantes ont été transmises aux départements
– 51% de conseils directs (éducatifs, juridiques…) à l’appelant au regard de la situation évoquée
– 51% de mises en lien avec le service de l’ASE en charge du mineur
– 45% d’envois de documentation sur la thématique
– 30% d’orientations vers des dispositifs locaux spécifiques relatifs à la prostitution des mineurs

Le 119 a affirmé son souhait de renforcer ses liens avec les différents services de protection de l’enfance (institutionnels et associatifs) pour continuer à fluidifier le traitement des situations et de contribuer à une veille nationale sur le phénomène.

Axe 2 : Cartographie nationale

Cette première année a permis l’instauration de 81 temps de travail avec 73 acteurs institutionnels ou associatifs différents. Un état des lieux des ressources et besoin a été fait, grâce à l’envoi de 4 questionnaires soumis aux départements à l’attention des directeurs enfance-famille, des services d’aide sociale à l’enfance (ASE), des cellules de recueil des informations préoccupantes (CRIP) et des foyers départementaux. Sur l’ensemble, 41 départements ont répondu à au moins 1 des 4 questionnaires. Une forte disparité entre les territoires a été identifiée, mais également une grande diversité des dispositifs lancés.

Répondants confrontés à des situations de prostitutions de mineurs :
– foyers (91,3%)
– CRIP (89%)
– ASE (86,2%)
– DEF (73%)

Cette cartographie pourra permettre :
– de continuer à identifier les organisations locales et nationales de lutte contre la prostitution des mineurs
– de mutualiser les pratiques locales innovantes en matière de repérage et d’accompagnement des mineurs en situation de prostitution
– d’organiser des rencontres partenariales ayant vocation à organiser une veille sur le phénomène de la prostitution des mineurs

Axe 3 : Sensibilisation

Dans le cadre de ce dernier axe, 8 interventions à l’attention de plus de 1000 professionnels ont été réalisées, ainsi que la conception d’une série de podcasts dont le 1er épisode s’intitule “Les dangers du numérique et la prostitution 2.0”, avec la participation de Samuel Comblez, psychologue de l’enfance et de l’adolescence et directeur des opérations de l’Association e-Enfance. D’une durée de 15 minutes environ, chaque épisode donne la parole à un expert sur l’un des aspects de la thématique. Dans le cadre du DLPM, le 119 souhaite développer la sensibilisation en poursuivant la construction d’outils, et contribuer à des projets nationaux et locaux de sensibilisation sur la thématique de la prostitution des mineurs.

Dans la continuité de ce grand travail de sensibilisation, le 119 a insisté sur sa volonté de continuer à mettre en place des interventions auprès des professionnels, participer à des colloques, et venir en soutien aux projets innovants, qu’ils soient locaux ou associatifs, telle que la création d’outils de sensibilisation. L’importance d’un travail en réseau, qu’Enfance Majuscule ne peut qu’approuver, a également été soulignée.

Le 119 prévoit d’ores et déjà le recrutement de 37 nouveaux écoutants, et un renforcement des équipes d’ici la rentrée septembre. La volonté de faire inscrire et reconnaître la prostitution des mineurs en tant que viol et non délit sera également au cœur de ce combat. Enfance Majuscule encourage avec force ce travail colossal et espère sincèrement qu’un jour, il puisse porter ses fruits et donner de meilleures chances d’éradiquer ce fléau qu’est celui de la prostitution des mineurs…

Lire la synthèse du bilan sur le site du 119